Le 15 mai 2020, le tribunal de commerce de Paris place Presstalis, premier distributeur de la presse française, en redressement judiciaire avec poursuite d’activité. La SAD (Société d’Agences et de Diffusion), l’une de ses antennes régionales, se retrouve en liquidation judiciaire sans poursuite d’activité. Ses 512 salariés seront licenciés, dont plus d’une centaine à Vénissieux, près de Lyon.
Les salariés de l’antenne de Vénissieux décident alors d’occuper les locaux de leur entreprise, avec un bail précaire. La majorité d’entre eux sont licenciés peu après la liquidation et touchent leurs indemnités chômage au début du mois de juillet 2020. Les 16 salariés protégés se retrouvent par contre dans un entre-deux inconfortable : l’inspection du travail refuse de valider leur licenciement car ils auraient dû bénéficier d’un reclassement au sein de l’entreprise Presstalis. Ils se retrouvent donc sans salaire, ni indemnités. Une caisse de solidarité créée au sein de la CGT de l’entreprise permet d’aider les plus fragiles.
Pendant ce temps, contrairement aux obligations légales, la presse écrite n’est plus livrée dans les bureaux de tabacs, ni chez les marchands ou kiosques de journaux de la région lyonnaise entre mi-mai à fin juin.
Les salariés mobilisés redémarrent l’activité au 1er juillet 2020, sous forme de régie temporaire. La presse arrive à nouveau dans les points de vente de la région. Avec la CGT de Marseille et Lyon, ils échafaudent un projet alternatif pour reprendre une partie de l’activité de l’entreprise en créant une SCIC (Société Coopérative d’Intérêt Collectif ). Ce modèle juridique leur permet de mobiliser tous les acteurs de la filière, très dépendants les uns des autres. Plusieurs collèges sont ainsi représentés au sein de la société : un premier regroupe les salariés, un deuxième les autres entreprises de la filière (fournisseurs, transporteurs), un troisième les usagers et citoyens qui ont pris une part au capital, un quatrième les collectivités territoriales.
La recherche de nouveaux locaux a pris du temps. Le local devait aussi être bien situé, car s’éloigner des lieux de distribution aurait représenté un coût supplémentaire. Il fallait un espace adapté aux poids lourds qui apportent les journaux fraîchement sortis de l’imprimerie, mais aussi suffisamment grand pour que tous les véhicules légers qui partent livrer les diffuseurs à 5 heures du matin aient la place de stationner en même temps. Pas facile aussi de trouver un local pour une activité qui vient d’être liquidée… Les salariés de la SCIC ont finalement obtenu une garantie financière de 440 000 euros des Messageries Lyonnaises de Presse qui a permis de débloquer les choses.
Après plusieurs mois de recherche, les 41 salariés qui souhaitaient faire partie de la SCIC ont emménagé dans leurs nouveaux locaux le 15 mai. Distribue et Vous est dans ses murs ! La lutte et la ténacité des salariés ont payé.