Par association symbolique, le rouge est affilié à la vie, car la chaleur des tissus est la garantie du vivant, cette simple approche poétique nous encouragerait à nous lever pour défendre ce reflet chromatique porteur d’espoir.
Mais ce n’est pas à la couleur du timbre que La Poste a décidé de s’attaquer, la cible se trouve bien évidemment ailleurs.
Ce timbre définissant la double notion de prioritaire et de J+1 (voire en H+) dans la mémoire collective, fait partie d’un patrimoine non dogmatique mais bien d’une expression issue des valeurs républicaines, l‘égalité de traitement sur l’ensemble du territoire, appelé aussi péréquation territoriale et tarifaire.
Stigmatiser, à l’heure du numérique, l’utilité de ce service est devenu monnaie courante et c’est bien dans ce créneau que la Poste a décidé de s’engouffrer. La cible se trouve à deux niveaux :
- Faire payer le prioritaire en multipliant par 20 le coût et ainsi créer un profit conséquent
- Modifier l’organisation du travail construite autour de cet engagement de J+1
Sur le coût et l’égalité de service :
la possibilité de couvrir le territoire national était réalisable il y a quelques années et peut le rester sous condition que les salariés et usagers s’emparent de leur bien commun que représente le Service Public Postal.
Bien que nous assistions au développement des technologies (nouvelles machines de tri performantes…) capables de répondre aux attentes en délais d’acheminement et de distribution, c’est l’inverse qui se produit. Cette situation démontre l’importance des technologies au service des besoins des populations et des salariés et non pas au seul profit d’une minorité de décideurs.
La Poste n’a eu de cesse de déconstruire le réseau d’acheminement sur la seule logique financière, réduire les amplitudes de départ et d’arrivée du courrier, supprimer les liaisons ferroviaires, supprimer les centres de traitements du courrier de proximité et enfin abandonner notre boussole culturelle : la notion de service public rendu à l’usager.
Aujourd’hui, cette orientation touche un des concepts républicains, elle délaisse l’égalité de traitement des citoyens. Le souci d’une nation est de préserver l’équilibre entre les uns et les autres.
30 % de nos concitoyens subissent la fracture numérique et un moyen performant de communication leur serait retiré.
L’annonce par le PDG du Groupe La Poste de la volonté de se débarrasser du timbre rouge est une atteinte au droit à la communication, droit constitutionnel rappelons-le.
Sur l’organisation du travail :
cet aspect est regardé par les dirigeants de La Poste en termes de coût. Notre organisation du travail repose sur l’engagement du J+1. La structuration de la distribution au ramassage du courrier est ordonnée à partir de cette contractualisation.
Sans timbre rouge, il n’y a plus besoin de facteur avec une tournée de quartier et un passage quotidien. Il n’y a plus besoin de relever les boîtes jaunes tous les jours, il n’y a plus besoin de centre de traitements en proximité…
Il n’y a plus besoin de service public postal !
Alors que les questions d’environnement sont au cœur des enjeux sociétaux, que La Poste veut réduire ses émissions de CO2 et devenir une entreprise « verte », elle abandonne la distribution de la lettre alors même que le papier est évalué, selon une étude faite par la Poste elle-même, comme un support de communication moins impactant pour la planète que les supports numériques et les data center.
Alors qu’elle entend supprimer le J+1 pour la lettre, La Poste annonce vouloir développer la distribution du colis en J+1 (voire en H+) !
Nous voyons bien là, à travers ces 2 derniers exemples, plein de dichotomies. Seule la rentabilité financière guide la stratégie du Groupe La Poste !
OUI ce n’est pas une histoire de couleur, mais bien une conception républicaine touchant la solidarité nationale.
Les conséquences seront quant à elles supportées par la société : perte d’emplois, fracturation technologique et territoriale.
Historiquement, le descendant du tarif unique (des années 70) est le timbre gris. Il est toujours le tarif « normal » dans deux cas : carte postale et envoi dans la même circonscription (même code postal). Mais le service s’est dégradé au point que ce timbre gris n’assure plus que le J+4 (de mémoire). D’où la « nécessité » de payer plus cher pour conserver le J+1 (sauf que, d’expérience, le timbre gris arrive souvent en J+1 !, dit autrement si tout le monde utilisait exclusivement le timbre gris , il serait rester le tarif officiel pour le J+1).
Bref, le tarif unique des années 70, est devenu le tarif normal mais plus lent de couleur verte (~années 80), puis devenu le tarif dit lent toujours de couleur verte (~années 90), puis devenu le tarif ecopli gris (officiellement encore plus lent) dans les années 2000. Ensuite s’est intercalé un tarif dit vert mais c’est une autre histoire.
Résumé : le seul délai acceptable est le J+1 (le niveau de mécanisation actuel le permet) au tarif unique (ecopli actuel).
Dernière remarque : toutes ces années les augmentations de tarifs annoncées par la Poste et les média (déjà énormes), ne sont qu’une partie des augmentations réelles, si on considère: 1.le surcoût cité ci-dessus pour avoir le J+1, 2. la suppression du 50gr qui oblige payer pour 100gr., 3. la suppression des timbres d’appoint (petites valeurs).