Philippe Martinez : « Tout le monde peut mener la campagne CGT »
Du fait de la situation sanitaire, les salariés des TPE font-ils part de besoins et de demandes particulières ?
À cause de l’isolement des salariés de TPE, il est parfois difficile d’avoir des informations qui remontent. En temps normal, ils appellent les structures syndicales, comme les UL et les UD. C’est encore plus vrai dans la situation actuelle, pour connaître leurs droits et avoir des informations en matière de protection sanitaire, de chômage partiel, de télétravail, d’arrêt maladie, de droits sociaux plus classiques…
Cela montre qu’il y a un réel besoin d’informations et on a d’ailleurs mis en place des « numéros verts » dans plusieurs régions, avec un vrai succès. Cela débouche parfois sur des contacts qui se prolongent et sur des adhésions.
La négociation d’accords nationaux interprofessionnels (ANI) est-elle particulièrement importante pour les salariés des TPE ?
Les salariés des TPE n’ont pas d’accord d’entreprise ni de représentation syndicale, donc tout se passe au niveau de la branche et, davantage encore, par des accords nationaux valables pour tous, quelle que soit la taille de l’entreprise, respectant la hiérarchie des normes, face la volonté patronale d’avoir des accords de gré-à-gré individuels.
Comment un syndicat comme la CGT peut agir sur le sort des salariés des TPE ?
Tout d’abord, il faut aller à leur rencontre et très concrètement, apporter des informations. Mais parfois aussi à l’employeur qui, bien souvent n’a pas de DRH, ni de conseiller juridique et ne connaît pas non plus les droits de ses salariés, les règles en matière de sécurité, salaires, heures supplémentaires…
Ça ne marche pas à tous les coups, mais on peut dans certains cas réussir à faire appliquer le droit du travail avant d’aller aux Prud’hommes. L’essentiel, c’est le contact et l’explication.
Comment la CGT agit avec les salariés des TPE face aux conséquences de la crise sanitaire ?
Il y a par exemple eu des mobilisations dans les remontées mécaniques, parfois sous des formes différentes que dans d’autres boîtes.
On a ainsi obtenu que des engagements de signatures de contrats saisonniers ou CDD soient tenus, ce qui ouvre, en attendant la reprise effective du boulot, des droits à chômage partiel. Notre démarche, c’est « informer, expliquer, faire des propositions, se mobiliser ».
Quels sont les grands enjeux de l’élection TPE ?
Il faut montrer aux salariés des TPE que cette élection leur permet au moins d’avoir des représentants qui prennent en compte leur situation spécifique. Aller à leur rencontre est de la responsabilité de la CGT.
Mais une élection d’une telle ampleur, avec près de cinq millions d’électeurs, doit aussi donner lieu à une campagne de communication de la part du gouvernement, avec des spots dans les grands médias, comme une campagne électorale « politique » à enjeu national. Tous les gouvernements – celui-là particulièrement, vu la considération qu’il a pour les organisations syndicales – mettent tout en œuvre pour qu’il y ait le moins de participation possible.
Cela vise à discréditer l’idée de l’utilité des syndicats. Mais plus encore, les salariés devraient bénéficier de temps pour voter, avoir des informations pratiques en amont… On pourrait même organiser, au lieu du vote par correspondance, un vote physique dans les mairies.
Quelles informations concrètes faut-il apporter aux salariés des TPE lors de la campagne ?
Cette campagne, malgré un public particulier, doit être comme les autres. Selon le secteur d’activité, la convention collective n’est pas la même.
Il faut donc s’adapter à leurs besoins, leur signaler aussi qu’ils élisent des représentants, qu’on n’appelle pas « délégués du personnel », même si ça y ressemble un peu, à l’échelle d’une région.
Enfin, porter les propositions de la CGT. Par exemple leur faire savoir que nous nous battons pour qu’ils aient droit aux activités sociales et culturelles, comme les salariés des entreprises disposant d’un CSE. On arrive à convaincre certains employeurs de dégager des fonds pour cela, dans leur branche.
Quel peut être le rôle de chaque adhérent de la CGT dans cette élection ?
Il est simple : tout le monde connaît ou croise des salariés de TPE, quand on va faire ses courses chez le boucher ou le boulanger, dans sa famille, dans ses relations…
Si chaque syndiqué convainc une ou deux personnes de voter et de voter CGT, cela fera un très beau score, presque 1,5 million de voix. Ce chiffre est important, mais pas démesuré, rapporté au nombre de syndiqués.