Le salaire : premier facteur d’attractivité des métiers
Si dans certains secteurs, les entreprises connaissent d’importantes difficultés à recruter ou garder les salariés, c’est d’abord dû aux conséquences de décisions de gestion patronales ou gouvernementales. Le salaire, comme reconnaissance du travail et des qualifications, est un élément essentiel pour le recrutement des salariés mais également pour les garder en emploi.
Or, les métiers ciblés par le ministère font face aux mêmes freins :
- des niveaux de salaires qui ne permettent pas de recruter des métiers qualifiés, ce qui a pour conséquences que les professionnels préfèrent exercer en libéral ;
- des revenus qui ont diminué au fil des années en raison de l’annualisation du temps de travail ;
- des salaires proches du Smic pour des métiers correspondant à des bas niveaux de qualification mais à haut niveau de technicité ;
- des salaires et conditions de travail qui ne correspondent pas aux valeurs portées par le métier poussent les salariés à en changer, ou à trouver un autre secteur où exercer. Ils quittent, par exemple, l’hôpital public pour le libéral ;
- des salaires qui ne prennent pas en compte l’ensemble du travail : les temps de déplacement, de préparation, ou encore les temps de corrections des copies pour les formateurs ne sont pas payés ;
- des grilles de salaires basses ne correspondant plus aux niveaux de qualification exigés à l’embauche. Elles provoquent la négociation au gré à gré dans les entreprises lors des embauches et favorisent ainsi des inégalités criantes entre les femmes et les hommes ;
- des grilles de classification qui ne permettent pas de déroulement de carrière et n’offrent pas aux salariés la capacité de se projeter dans l’entreprise ou dans la branche.
Les bas salaires provoquent dans certains secteurs des économies parallèles. L’emploi qualifié et le salarié se retrouve ainsi en concurrence avec l’emploi non déclaré ou le travail « au noir »…
La tension exercée sur les métiers est bien le fruit de stratégies patronales qui peuvent aller jusqu’à faire sortir le travail et le salariat des entreprises, afin de sous-payer, d’augmenter la flexibilité sur le travail et les travailleurs et d’augmenter les profits.
Les conditions d’emploi et de travail : des facteurs aggravants
La durée courte des contrats et la précarité de l’emploi sont des facteurs qui rendent des emplois peu attractifs, ou poussent les salariés à quitter rapidement la branche d’activité. Ce phénomène a pour premier effet de créer un grand turn-over.
Dans certains secteurs, la diminution du temps de prestation et la multiplicité des vacations exceptionnelles à la demande des clients ont eu des conséquences sur la durée des contrats (1 à 7 jours). Les salariés n’ont plus de vision ni garantie de continuité d’une semaine sur l’autre.
Même dans des secteurs « passion » comme le spectacle, ce phénomène est important, et rares sont ceux qui se maintiennent durant toute leur carrière professionnelle dans la filière. Les incertitudes liées à l’emploi, les parcours du combattant pour trouver des logements ou accéder à la propriété, les difficultés d’accès aux droits sociaux – comme l’assurance maladie ou les congés maternité – sont autant d’éléments déterminants incitant les salariés à se réorienter professionnellement autour de 30 ans.
Les conditions de travail sont également des éléments déterminants pointés par nos fédérations
Dans la fonction publique hospitalière, l’intensité du travail cumulée aux bas salaires sont à l’origine du turn over important dans les professions d’aides-soignants, auxiliaires et infirmiers en soins généraux. Si ces derniers ont la possibilité d’aller exercer en libéral, les autres doivent se reconvertir.
Certains métiers très physiques obligent les salariés à se reconvertir ou offrent des fins de carrières très difficiles. Les conditions de travail pénible (posture debout), le travail de nuit, la dangerosité de certains métiers sont autant de facteurs qui font que les salariés ont du mal à se projeter dans la profession.
Plus largement, les 6 facteurs de risques psycho-sociaux doivent également être pris en compte comme un critère à part entière pour analyser ces métiers et leur attractivité :
- exigences du travail (horaires, intensité, complexité, froid, bruit, organisation du travail…) ;
- exigences émotionnelles (public difficile, contact avec la souffrance…) ;
- autonomie et latitude décisionnelle ;
- relations au travail (avec ses pairs mais aussi la hiérarchie, rémunération…) ;
- reconnaissance des usagers mais aussi des pairs et de la hiérarchie) ;
- conflits de valeurs (conflits éthiques, qualité du travail empêchée…) ;
- Iinsécurité au travail (fragilité de l’emploi, niveau salarial, perspectives d’évolution, peur…)
Ce ne sont pas les métiers qui sont en tension : c’est le travail, les salaires et les travailleurs qui sont sous tension de la recherche constante de la maximisation des profits.
La CGT porte l’idée d’un autre modèle économique, social et solidaire&
La liberté, l’autonomie, l’égalité et la démocratie au travail, sont au cœur de nos préoccupations. La réalité du travail doit nous amener à le repenser avec les travailleurs eux-mêmes, notamment au regard des évolutions technologiques à venir.
Sans cela, le « mal-travail » se poursuivra, le « mal-être » au travail se propagera, tous deux avec leur cortège de conséquences irréversibles.
Au-delà du travail sur la relocalisation des filières stratégiques, il est donc nécessaire pour la CGT de mettre au débat :
- la réduction du temps de travail pour travailler tous et travailler mieux ;
- la retraite à 60 ans et départs anticipés pour les métiers pénibles, avec contrats de génération ;
- la rémunération du travail plutôt que le capital : augmentation immédiate du Smic et des salaires ;
- l’instauration des conditions pour une véritable démocratie dans l’entreprise afin que les modes de production et les conditions de travail soient débattues avec les salariés, experts de leur travail et leurs organisations syndicales ;
- le conditionnement des aides aux entreprises au respect de normes sociales et environnementales, au maintien de l’emploi et aux conditions de travail ;
- 10 % des heures travaillées dans les entreprises doivent être consacrées à la formation professionnelle, afin de permettre aux salariés de s’émanciper, d’évoluer professionnellement ou de se reconvertir ;
- l’abandon des critères classants et la négociation de réelles grilles de classifications prenant en compte qualifications, technicité…
- la revalorisation des métiers à prédominance féminine.