Intervention liminaire CGT LPR CNESER 15 septembre 2020

Compte tenu de l’état très préoccupant de la situation de la recherche publique française, acté par une grande majorité de la communauté scientifique, la Loi de Programmation de la Recherche, qui va être débattue à l’assemblée nationale la semaine prochaine, serait l’occasion de rectifier la donne.
Malheureusement, ce n’est pas le cas du projet présenté par le gouvernement. Comme l’a mentionné notre collègue, rapporteure de l’avis négatif qu’a porté le CESE sur le projet de loi : « Peut-on soigner un système avec les outils qui l’ont rendu malade ? »

Par exemple, sur le volet financement, on est loin du compte ! 25 Mds pour la recherche publique étalée sur 10 ans, ne permettra pas d’atteindre les 1% du PIB attendu suite à l’engagement européen pris par la France au début du siècle.
Par ailleurs, loin de minimiser la dépendance aux Appels à Projets (AP), la LPR va l’accentuer et ce très rapidement si on en croit les déclarations sur le plan de relance qui prévoit l’anticipation des financements accordés à l’ANR. Cette politique d’AP, érigée en priorité, est très décriée par une grande majorité de la communauté scientifique. Elle est pénalisante (extrême sélectivité, lourdeur administrativement, chronophagie ,…) et nullement adaptée à une recherche long terme et fondamentale plus que nécessaire car à l’amont de tout.

Pour ce qui est de emplois, c’est en dizaine de milliers d’emplois statutaires supplémentaires qu’il faut raisonner si l’on veut réparer les dégâts produits par les contraintes budgétaires des années précédentes. Ce n’est pas le chemin emprunté par la LPR.

Pour ce qui est de l’attractivité des métiers, les contrats de projets ajustés sur la durée des projets et fallacieusement intitulé CDI, ainsi que toutes les autres dispositions envisagées, ne sont rien de plus qu’une précarité renforcée proposée à la jeunesse.

Quant aux rémunérations, bien que le niveau des salaires pratiqués dans la recherche publique, ait été reconnu indigne au regard de la qualification de haut niveau de ses salariés, les financements envisagés pour rectifier le problème tout comme la façon d’opérer, par la voie indemnitaire, sont loin d’être satisfaisants. Et ce n’est pas le protocole d’accord relatif à « l’amélioration des rémunérations et des carrières” proposé ces derniers jours pour faire « passer la pilule » qui va améliorer cette situation et calmer nos esprits.

Enfin, pour ce qui est de la recherche Partenariale, le constat est presque unanime quant à la l’inefficacité des dispositifs existants. Qu’à cela ne tienne, on continue comme avant voire on accentue.

Aucune remise en cause des dispositifs d’interfaces comme les SATT, les CRT, etc qui en grande partie sont inefficaces et accaparent bons nombres de financements publics.

Aucune remise en cause également du CIR dont l’efficacité est loin d’être à la hauteur des investissements consentis.

Rappelons que toutes les instances consultées en amont du débat parlementaire ont émis des avis négatifs voire très critiques sur ce projet de loi. Faut-il également rappeler ici la séance indigne que la ministre a fait subir aux membres du CNESER le 18 juin dernier ?
Convocations et documents transmis sans respecter les délais, rendant impossible le travail préparatoire et très compliqués les déplacements pour les élu·es non parisiens, quorum établi sur la base des réponses faites par messagerie, multiplicité des procurations que le ministère n’a pas comptabilisées, refus de mettre au vote les amendements déposés par la CGT après le départ des élu·es, défaillance du système de vote, absence de compte rendu et de relevé de vote ….
Autant d’amateurisme et de violation des textes réglementaires qui s’ajoutent au mépris affiché par les représentant·es du ministère envers les membres du CNESER : 21 heures de débat imposées, de multiples pressions, interruptions intempestives de votes en cours, négociations … Le groupe CGT au CNESER ne peut accepter qu’on se vante d’un avis positif acquis dans de telles conditions : nous attendons jusqu’à la fin du mois une réponse de la ministre à notre demande d’annulation et de report de ces séances consacrées à l’examen de la LPPR, nous réservant la possibilité d’un référé dans les tous prochains jours.

Et nous continuons à appeler les collègues à se rassembler massivement pour lutter ensemble contre ce projet, en particulier ce 17 septembre partout en France et le 21, devant l’assemblée nationale à Paris à 14h, jour d’ouverture de l’examen du texte.

Pour la CGT, une LPR à même de redresser la situation, c’est une LPR capable de permettre aux universités, aux organismes nationaux de recherche de retrouver leurs capacités à mettre en oeuvre une politique scientifique de long terme. C’est-à-dire une loi capable d’augmenter significativement leurs financements de base versés via la subvention pour charge de service public, d’accroître notablement leurs effectifs, de reconnaître, donc payer la qualification de haut niveau de leur personnel et de réduire la précarité qu’ils subissent. C’est aussi une LPR capable de créer les conditions de transferts profitables au secteur public comme aux entreprises. C’est enfin une LPR capable de mettre en place un dispositif d’aide à la recherche privée qui accroit l’investissement en R&D du monde économique.

Pour l’heure, nous demandons des moyens et des postes statutaires en urgence.
Nous exigeons l’abandon de la LPR et nous restons déterminés à construire un grand service public de l’’enseignement supérieur et de la recherche, au service de toutes et tous, avec des moyens humains, financiers et matériels garantis et pérennes, ou la précarité n’est plus de mise.

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