Alors que de nombreuses associations sont en difficultés, voire vont disparaitre, du fait de la pandémie, l’État en profite pour accélérer la mise en œuvre de son plan de restructuration de la vie associative. Son projet va au-delà d’une simple réforme puisqu’il s’agit d’un bouleversement politique systémique d’un pan entier de l’organisation de la vie sociale du pays : la vie associative.
En plein confinement, la mission « Accélérer les alliances stratégiques entre associations et entreprises » a remis sa note de synthèse à Gabriel Attal, alors secrétaire d’État. Dans ce texte on retrouve, en concentré et en accéléré, tous les ingrédients du projet gouvernemental de privatisation de la vie associative et de remplacement des subventions publiques par les financements d’entreprises : le mécénat, les cagnottes, les dons (comme dans le sport avec l’opération « soutiens ton club ») et autres formes de la philanthropie à la française.
En effet, l’objectif est de proposer un financement entièrement tourné vers les fonds privés, à la fois par les dons de sommes défiscalisées et par le par le don de compétences c’est-à-dire la possibilité de détacher des journées de travail de salarié·es des entreprises vers les associations. L’État ne devient plus alors qu’un « facilitateur » et un opérateur technique.
C’est un changement sociétal majeur. Il abandonne sa mission régalienne de garant des solidarités en confiant le financement de l’action publique aux entreprises et aux donateur·trices. Il mobilise l’Éducation nationale à former dès le plus jeune âge les enfants et les jeunes à la philanthropie et la charité qui sont l’inverse de la solidarité. Elles ne sont qu’initiatives individuelles alors que la solidarité est éminemment collective.
Sarah El Haïry est aujourd’hui au gouvernement celle qui est chargée de ce projet. Or, en 2018, elle était rapporteuse d’une proposition de loi sur… le financement des associations. Et, plus que cela, elle a remis au gouvernement, alors qu’elle était encore députée, un rapport en juin 2020 intitulé… Pour une philanthropie à la française.
Ce projet libéral nous concerne toutes et tous !
Le poids sociétal de la vie associative (Source : Ministère de l’Éducation et de la Jeunesse, 2018) est très important dans notre pays qui compte :
- 1,5 millions d’associations
- 1,8 millions de salarié·es (1,3 millions ETP), soit 10 % de l’emploi privé en France
- 163 000 associations employeuses
- 110 milliards d’euros de budget, soit 5 % du PIB
- 39 milliards d’euros de salaires distribués
- 22 millions de bénévoles
Alors que la demande des citoyen·nes de peser sur les choix et les décisions de l’État n’a jamais été aussi forte (gilets jaunes, lutte pour le climat, lutte contre les discriminations,…), le gouvernement s’attaque à un des outils de l’émancipation et à son maillage territorial.
Il y a une grande similitude entre ce plan de privatisation de la vie associative et les politiques qui mettent à mal nos services publics : des partenariats public/privé dévastateurs, des financements par appels à projets ou par action. Lutter contre ce projet gouvernemental, c’est donc lutter contre des choix ultralibéraux de ce gouvernement qui impactent les conditions de travail des travailleur·ses du secteur et la qualité de la vie quotidienne, collective et démocratique de toutes et tous.
Pour la FERC-CGT, notre lutte consiste aussi à défendre et développer l’accès de toutes et tous aux besoins fondamentaux, dont font partie à part entière l’éducation, la culture, le sport.
Montreuil, le 4 septembre 2020