Sans surprise, les salariés ont appris la décision du tribunal de commerce de Marseille concernant la reprise d’Alinéa, placé en liquidation judiciaire par le groupe Mulliez le 13 mai.
Le tribunal a donc validé le repreneur potentiel, Alexis Mulliez, l’actuel PDG qui détient 15 % du capital, et de l’Association familiale Mulliez (AFM), qui possède les 85 % restant.
Par quel tour de passe-passe une telle décision est-elle possible ?
La réponse est un vide juridique laissé par l’ordonnance gouvernementale du 20 mai, qui permet aux dirigeants d’entreprise ayant déposé le bilan de se représenter comme acquéreur. Sorti en plein confinement, ce décret avait pour objectif de relancer l’économie, en permettant à des patrons de petites entreprises ayant coulé de reprendre leur affaire, mais le dispositif a été détourné par des groupes, comme Mulliez, qui se portent très bien.
Propriétaire d’Auchan, Alinéa, Leroy Merlin, Kiabi, Décathlon, Cultura, Happy Chic, Pimkie… la famille Mulliez est à la tête d’un empire dont la fortune est estimée à 26 milliards d’euros. Ces dernières années, le groupe Mulliez a versé 2,5 milliards d’euros de dividendes et touché des millions d’euros de CICE.
La décision du tribunal va permettre à Alinéa d’effacer ses difficultés structurelles – l’entreprise a perdu 300 millions d’euros entre 2012 et 2019 – et de repositionner l’enseigne sur le digital, ce aux frais du contribuable. « Ce n’est pas le juge qui va essuyer les dettes de l’entreprise », note Amar Lagha, secrétaire général de la fédération CGT Commerces et Services.
Conséquences de cette stratégie :
- la suppression de 992 emplois ;
- la fermeture de 17 magasins sur 26.
Seuls les magasins d’Aubagne, Avignon, Montpellier, Blagnac, Mérignac, Grenoble, Limoges, Paris-Herblay et Nancy ont échappé à l’hécatombe.