C’est sur la base de ces questionnements qu’ont été lancées les premières initiatives pour aller à la rencontre des salarié·e·s des TPE qui, pour la troisième fois, auront la possibilité d’élire leurs représentant·e·s fin 2020 (les précédents scrutins avaient eu lieu en 2012 et 2016).
Mercredi 20 et jeudi 21 novembre, à la plaine Saint–Denis, au milieu de cette vaste zone où s’entremêlent les sociétés de productions et de prestations techniques pour l’audiovisuel, et dans le XIIe arrondissement de Paris, quartier qui fourmille également de très petites entreprises, une équipe militante rencontrait les salarié·e·s.
Mon boulot : « éclatant et génial », mais « épuisant », pour Ella, technicienne du spectacle. « Et je me sens plus libre et moins exploitée, en travaillant dans une petite structure. » Idem pour Michel : lui, il adore travailler dans une TPE.
Il n’envisage pas d’intégrer une plus grande structure. « Liberté, responsabilité », sont les premiers mots qui lui viennent en tête. Sauf que… Il y a quelques mois, son patron a fermé la porte et est parti avec l’argent… Et là ? Comment se battre, comment agir, sans représentant·e·s syndicaux·les, en étant seul face au patron fraudeur ? Si Michel n’a jamais envisagé de s’approcher d’un syndicat, il en reconnaît, depuis cet événement, une certaine utilité…
Au cœur de la plaine Saint-Denis, entourée des locaux de production, est installée une ferme urbaine. Gabrielle y travaille à mi-temps. « Le projet de faire évoluer la ville pour la rendre plus verte a vraiment du sens », affirme-t-elle fièrement. « Faire vivre les acteurs locaux, […] « jardiner sans pesticides, c’est une urgence. » Mais son travail à elle a-t-il du sens ? « Non pas du tout », répond-elle… « Mes tâches ne sont pas intéressantes : je range, je nettoie… On ne me demande pas de mettre en valeur autrement ce site.
Et quand mon collègue et moi, on envoie des mails au responsable, on lui propose des projets, on n’a jamais de réponse. J’ai 23 ans, je rentre dans la vie active. Je m’aperçois que je suis plus sensible au sens que mon travail peut avoir qu’à mon salaire. » Gabrielle apprend lors de ces échanges qu’elle a l’opportunité de s’exprimer dans un cadre collectif, qu’elle pourra voter fin 2020… Sourire.
Ce qui plait à Isabelle, qui travaille dans une petite entreprise d’aménagement de l’espace public, c’est l’esprit de famille, l’autonomie et la responsabilité dont elle bénéficie et surtout, voir un projet naître, évoluer et se terminer. « On se sent plus utile. » En revanche, elle déplore totalement l’« absence de comité d’entreprise » et des « heures sup souvent nécessaires mais pas souvent rémunérées ». « Si je veux suivre une formation », poursuit-elle, « auprès de qui m’adresser ? Comment m’informer sur mes droits ? C’est un vrai problème qu’on ne puisse pas rencontrer facilement un syndicat. »
Les deux journées se terminent avec la rencontre d’Irina, dame de ménage pour une petite structure.
D’abord intimidée par l’échange, elle nous dit être attachée à son travail, et exprime sa fierté de rendre les locaux accueillants. Mais elle poursuivit vite en insistant sur la souffrance qu’elle éprouve au quotidien de ne pas pouvoir s’exprimer, revendiquer… « Mon patron nous dit tout le temps que si on n’est pas content, on dégage… » Irina repart avec les infos concernant les élections dans les TPE l’année prochaine, et apprend qu’elle a, comme beaucoup d’autres salarié·e·s, la possibilité d’intervenir et d’agir, y compris dans une petite boîte…
Une deuxième étape pour aller à la rencontre des salarié·e·s des TPE, aura lieu le 6 décembre, à saint-Brieuc dans les Côtes d’Armor.
Il sera question, bien évidemment, du projet de réforme de la retraite, mais également des possibilités qu’offrent les groupements d’entreprises, et la gestion prévisionnelle des empois et des compétences dans les territoires.