Réforme de l’enseignement professionnel : donner moins à celles et ceux qui ont moins !

Alors qu’un début de mobilisation semble gagner les lycées généraux et que la loi Blanquer sur l’école de la confiance fait parler d’elle y compris dans le grand public, il est une réforme qui se met en place à marche forcée malgré un début de mobilisation des collègues concernés.

Et ce n’est pas un hasard si cette réforme touche la voie professionnelle, grande oubliée de l’éducation Nationale et des élites de notre pays. Il faut dire que les familles et les jeunes des milieux défavorisés, celles et ceux qui fréquentent majoritairement les bancs et les ateliers des lycées professionnels, ne pèsent pas lourd !

Pourtant, le contenu de cette réforme s’il était mieux connu, y compris des camarades, devrait suffire à mobiliser toute la société. Car c’est encore sur les plus fragiles qu’on frappe, celles et ceux qui ont souvent connu la difficulté scolaire à l’école puis au collège et qui se retrouvent sans l’avoir toujours choisi en lycée professionnel pour préparer un CAP en 2 ans ou un Bac Professionnel en 3 ans.

Les grandes lignes de cette réforme idéologique et budgétaire, qui est censée s’appliquer dès la rentrée prochaine, sont édifiantes.

Moins d’heures en Français, en histoire-géo et en maths. Pourquoi faire ?
Inutile pour former des ouvrier·es à qui on ne demandera pas de penser trop et qui seront sans perspective d’évolution de carrière ! Et comme en plus cela permet de faire des économies budgétaires, c’est gagnant-gagnant…

Pour mesurer l’intérêt porté au public des LP, il suffit de remarquer la précipitation avec laquelle les projets de programmes ont été conçus puisque moins de 2 mois auront suffi pour les construire. Sans parler des coupes sombres opérées dans ces programmes. Ainsi en langues vivantes la dimension culturelle et citoyenne est effacée. En Français histoire-géo, les projets de programmes entérinent la réduction des enseignements et donnent une orientation politique claire en centrant sur la mondialisation économique libérale. Cela permettra de mieux faire adhérer à cette conception unilatérale de la marche du monde, en laissant de côté une majeure partie de la population et les problématiques liées à l’écologie.

En maths-sciences, on entérine une perte de savoirs et de savoir-faire pour les élèves de la voie professionnelle, ne permettant plus une insertion ou une poursuite d’études réussies. Faute de temps s’ils·elles veulent tout aborder, les enseignant·es ne pourront approfondir les notions, qui seront réduites à une fonction utilitariste.

Moins de formation professionnelle, déspécialisation et déqualification par la réduction des 80 formations actuellement existantes à quelques familles de métiers. On est passé en 2009 du Bac pro 4 ans à un Bac Pro 3 ans, et si la réforme passe ce sera désormais un Bac Pro en 2 ans et demi.

C’est aussi une promotion à tout va de l’apprentissage, dont on sait qu’il est particulièrement discriminant pour les jeunes des quartiers populaires et les filles, en raison de la discrimination à la signature du contrat. Le LP deviendrait une sorte de garderie dans l’attente qu’un·e jeune signe un contrat d’apprentissage, avec 2 mesures qui sont des non-sens pédagogiques : la mixité des parcours (on commence sa formation en LP puis on la continue en apprentissage) et le mixage des publics (mélange d’élèves en formation initiale et d’apprenti·es, avec des rythmes différents, des périodes de stage ou d’alternance différentes, et un mélange entre élèves sans revenu et apprenti·es avec un petit salaire… L’ambiance risque d’être sympa dans la classe !)

On retrouve là toute la logique du ministre Blanquer, couplée au dispositif ParcourSup, qui met en place la sélection précoce et le tri social, en claquant définitivement la porte de l’université au nez des lycéen·nes professionnels.

A moins que toutes et tous ensemble on ne décide de renverser la table et de changer la donne !

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