La France condamnée à l’ONU pour l’arrêt Baby Loup

LIBERTÉS EN ENTREPRISE

Dans une décision du 10 août 2018, la France a été condamnée par le Comité des droits de l’homme de l’ONU, pour atteinte à la liberté religieuse dans l’entreprise et au principe de non-discrimination. Cette juridiction chargée de veiller au respect du Pacte international relatif aux droits civils et politiques avait été saisie en dernier recours par une salariée injustement licenciée.
Employée par une crèche privée Baby Loup, la salariée avait été licenciée pour avoir refusé de retirer son foulard contrairement à un principe de neutralité prévu par le règlement intérieur de l’entreprise. La Cour de cassation avait, en 2014, estimé que le règlement intérieur de la crèche pouvait restreindre la liberté de la salariée de manifester sa religion et que son licenciement était donc valable.
Le Comité des droits de l’homme juge, d’une part, que l’interdiction faite à la salariée de porter son foulard sur son lieu de travail constitue une atteinte à la liberté de manifester sa religion dans l’entreprise. Il estime que le port d’un foulard par une éducatrice de la crèche ne portait pas atteinte aux enfants et aux parents la fréquentant donc que son interdiction n’était pas « nécessaire ». D’autre part, il considère que la salariée a subi une discrimination basée sur le genre et la religion. Il précise que les « restrictions à la liberté de manifester sa religion ou ses convictions qui affectent particulièrement les personnes appartenant à certaines religions et les filles » ont des effets « sur le sentiment d’exclusion et de marginalisation de certains groupes [qui] pourraient aller à l’encontre des buts recherchés. » Ainsi, l’État se voit imposer d’indemniser la salariée licenciée et de « prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir des violations similaires à l’avenir. »
La CGT qui défend au quotidien les libertés des salariés ne peut que saluer cette décision. Les principes de neutralité ou de laïcité ne peuvent concerner que les agents du service public et non pas les salariés des entreprises privées. Le salarié est lié à son employeur par un contrat de travail. Il doit fournir un travail mais n’est pas tenu de renoncer à ses droits fondamentaux comme la liberté d’expression ni de se défaire de son identité. La CGT n’aura de cesse de veiller à ce que le pouvoir patronal soit suffisamment circonscrit, afin que les libertés ne s’arrêtent pas à la porte de l’entreprise.
Dans les entreprises, la CGT défend la liberté d’expression dans ses différentes composantes : liberté religieuse, de conscience, philosophique, syndicale, politique, vestimentaire, sexuelle, etc. Si l’on peut admettre des restrictions aux libertés notamment pour des raisons d’hygiène ou de sécurité, ces restrictions doivent être strictement encadrées.

Haro sur le principe de neutralité de la loi Travail
Depuis l’affaire Baby Loup, la loi « Travail » de 2016 a instauré un « principe de neutralité » dans le Code du travail. Ce faisant, cette loi a permis la généralisation à toutes les entreprises des restrictions aux libertés qui existaient dans la crèche Baby Loup. Des restrictions qui sont aujourd’hui condamnées.
La CGT rappelle son opposition au « principe de neutralité » dans les entreprises privées et la nécessité de l’abroger. Dans une société démocratique, la liberté devrait être le principe et sa restriction l’exception. Faute d’action de la part du gouvernement, il appartiendra à toutes les juridictions, du Conseil de prud’hommes à la Cour de cassation, de respecter le Pacte international relatif aux droits civils et politiques en neutralisant les dispositions législatives non conformes.

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